Presque deux mois après la confirmation d’un premier cas de covid-19 au Costa Rica, le pays semble s’en sortir plutôt bien dans la gestion de la pandémie, enregistrant pour le moment un taux de létalité particulièrement bas, le plus bas d’Amérique Latine. Mais comment expliquer ces chiffres prometteurs ? Quelles interprétations pouvons-nous en tirer ? On tente de faire le point.
Des statistiques encourageantes
Le 6 mars dernier, le Costa Rica enregistrait son premier cas officiel de malade du Covid-19. Il s’agissait du premier en Amérique Centrale. C’était une ressortissante américaine alors de passage dans le pays d’Amérique Centrale. Aujourd’hui, près de deux mois plus tard, le nombre avoisine les 700 contaminations dans le pays (pour une population de 5 millions d’habitants). Le nombre de décès, en revanche, reste particulièrement bas. A l’heure où nous écrivons ces lignes, 6 décès liés au Coronavirus ont été recensés. Selon les chiffres de la John Hopkins University, cela correspondrait à un taux de létalité de 0,9 %, soit le plus bas d’Amérique Latine. A titre de comparaison, le taux de létalité en France est de 14,1 %, 2,3 % en Corée du Sud et 0,1 % à Singapour.
Mieux, depuis le pic de contamination connu le 9 avril dernier (avec 37 nouveaux cas confirmés), le Costa Rica voit sa courbe de nouveaux cas ostensiblement diminuer. Depuis une quinzaine de jours entre O et 15 nouveaux cas maximum sont recensés chaque jour. Pour le moment, une quinzaine de personnes sont hospitalisées, dont la moitié en soin intensif.
Mais alors, comment expliquer ces chiffres particulièrement positifs ? Sont-ils dus aux mesures gouvernementales ? Au système de santé ? Au comportement des Costariciens ? A vrai dire, un peu des trois ! Si la situation reste sous contrôle, cela semble grâce à la collaboration de trois acteurs clés du Costa Rica : l’Etat, la recherche et la société civile.
Les mesures gouvernementales : une communication bien huilée
C’est devenu un rendez-vous attendu par beaucoup des Costariciens : chaque jour, le ministère de la Santé, représenté par le ministre Daniel Salas, informe sur l’avancée de la pandémie. En effet, il formule ses recommandations. Le ton est solennel. L’objectif est clair : montrer à la population que l’état prend le problème à bras le corps. Pour cela, le gouvernement a déjà annoncé plusieurs mesures qui sont disponibles en ligne sur le site du Ministère de la Santé.
Dès le 9 mars, soit bien avant les Etats-Unis ou le Mexique, le gouvernement a imposé le télétravail dans les administrations. S’en est suivi l’interdiction de tous les événements d’ampleur, la fermeture des écoles, ainsi que les lieux d’échange social (bars, cinémas, théâtres, discothèques, etc.). Seuls les restaurants restent ouverts, à condition de respecter une capacité maximale de 50%. Le 16 mars, le Costa Rica déclare l’état d’urgence sanitaire. Dans la foulée la fermeture de ses frontières est annoncées, quelles soient terrestres, aériennes ou maritimes. Ensuite, le pays ferme petit à petit ses parcs nationaux et ses plages. Le Costa Rica a également prévu une réglementation concernant le trafic. Aucun véhicule (hormis les véhicules nécessaires comme des ambulances, etc) n’est autorisé à sortir entre 19h et 5 du matin. Le gouvernement a mis aussi en place un système de circulation alternée, sur base des numéros de plaque des véhicules.
Côté économie, l’Etat a pris plusieurs mesures pour aider la population à traverser la crise. Par exemple, la mise en place de moratoire des impôts ainsi que l’interdiction de couper l’eau dans un ménage. L’eau considéré comme étant essentiel pour se laver les mains et ainsi éviter la contamination.
Une communication jusqu’à l’international
Il y a quelques semaines, le président du Costa Rica Carlos Alvarado proposait à l’OMS (l’Organisation Mondiale de la Santé) de mutualiser les efforts par le biais d’une plateforme. Elles répertorierait toutes les avancées technologiques et médicales enregistrées dans le monde. De plus, cette plateforme serait accessible à tous ce qui permettraient d’une manière ou d’une autre de détecter, prévenir, contrôler et ainsi traiter la pandémie du COVID-19.
« Tous les pays de toutes les régions du monde, qu’ils soient grands ou petits, riches ou pauvres, doivent avoir accès aux médicaments, aux vaccins, aux traitements et aux avancées scientifiques afin de prendre soin de la population », demandait alors le chef d’état Costaricien.
Un appel qui a été entendu par la communauté internationale. L’OMS vient d’annoncer en effet le lancement du projet « Act Accelerator ». Il sera lancé dès le 4 mai prochain. L’objectif visé est d’accélérer l’élaboration, la production et l’accès équitable aux nouvelles technologies sanitaires essentielles dans la lutte contre le coronavirus. Le président Costaricien a pu s’entretenir le temps d’une réunion virtuelle avec le directeur de l’OMS, le Dr Tedros Adhanom ainsi qu’avec plusieurs autres chefs d’état dont Emmanuel Macron, le président de la France ou encore Angela Merkel, la chancelière allemande.
Une initiative qui vient conforter l’image de « bon élève » dont jouit le Costa Rica en ce moment à l’international. Une image corroborée également par l’ONU à travers les propos d’Alice Shackelford, coordinatrice de l’ONU basée au Costa Rica. Cette femmme saluait en mars dernier la réponse du pays pour ralentir la pandémie du Covid-19.
Un des meilleurs systèmes de santé d’Amérique Latine
L’efficacité du système de santé costaricien peut également expliquer, en partie, cette bonne gestion de la crise. Universel et gratuit (dans l’ensemble), le système de soin de santé au Costa Rica s’est petit à petit imposé comme l’un des meilleurs système d’Amérique Latine. Dès le début de la pandémie, les hôpitaux ainsi que les Universités (en particulier la UCR, l’Université de Costa Rica) se sont associés pour augmenter la production de masques et de respirateurs. En fait, ils ont participer à la recherche d’un anti-virus. La UCR travaille notamment à la conception d’un traitement sur base du plasma des guéris du COVID-19. L’idée des chercheurs de cette université est dans un premier temps, d’extraire les anti-corps du sang des patients qui ont guéri du Covid-19. Ensuite, l’idée est de les injecter via un traitement directement dans le corps des malades du virus.
Le Costa Rica, un pays habitué aux virus saisonniers
Certes, on n’a pour le moment pas encore assez d’éléments pour déterminer si le virus du COVID-19 est un virus saisonnier ou non. Néanmoins, si cela s’avérait le cas, le Costa Rica partirait avec un petit « avantage » par rapport aux pays occidentaux. En tant que pays tropical, c’est un habitué des virus saisonniers. De ce fait, il sait comment réagir. Rappelons en effet que chaque année des virus comme la Dengue (pour lequel il n’existe pas encore de vaccin) ou encore le virus Sincitial (touchant particulièrement les nouveau-nés et les enfants en bas âge) reviennent menacer la santé des habitants. Pour éviter tout drame, le pays n’a eu d’autres choix que de s’adapter et développer de nouveaux réflexes sanitaires. La population est consciente des dangers et tout cela est bien ancré dans l’inconscient collectif.
Les Costariciens, un peuple orgueilleux et discipliné
Ce qui nous amène à notre troisième argument, et non des moindres : l’autodiscipline des habitants du Costa Rica. Rappelons par exemple que, contrairement à la France ou la Belgique, le Costa Rica n’a pas décrété officiellement de confinement strict. La mise en place du confinement repose essentiellement sur la responsabilité citoyenne des Costariciens. Sous le slogan « Quedate en Casa » (Reste à la maison), le gouvernement implore la population à s’autodiscipliner et éviter tous les déplacements inutiles.
Et ça marche ! Les Costariciens soutiennent les mesures du gouvernement et en sont fiers. Il n’y a qu’à aller faire un tour du côté du site internet du Ministère de la Santé. On remarque un grand nombre de commentaires élogieux quant à la gestion de la crise sanitaire. Une discipline qui peut avoir un petit côté paternaliste par moment. Gare à celui qui ne suivrait pas le mouvement national ! La délation est facile et les regards sont à l’affut pour débusquer le récalcitrant.
Une certaine forme d’intolérance qui se constate également à l’égard des pays voisins, en particulier le Nicaragua. Le pays voisin est en effet pointé du doigt pour sa gestion de la crise. Le président Daniel Ortega a en effet plutôt brillé par son absence ces dernières semaines. Une problématique importante quand on sait le nombre élevé d’immigrés nicaraguayens vivant actuellement sur le sol costaricien. Près de 10% de la population du Costa Rica sont Nicaraguayens. Dans ce contexte, les amalgames ont parfois la vie dure. C’est ce que précise l’anthropologue française Elisabeth Cunin dans son article « Le Costa Rica, bon élève de la pandémie ? » : « Aux récentes mobilisations anti-migrants risque donc de se superposer une association implicite entre Nicaraguayens et Covid-19 ».
En conclusion : le Costa Rica, déjà tourné vers l’avenir
Grâce à cette communication bien huilée, que ce soit à l’échelle du pays ou à l’international, combinée à une parfaite collaboration entre l’Etat, le secteur de la recherche et la société civile, le Costa Rica espère sortir vainqueur de la crise. L’objectif ? Soigner l’image du pays, auprès des habitants tout d’abord, car pour obtenir des résultats probants, il faut fédérer. Mais surtout soigner son image à l’étranger. On le sait, l’industrie touristique est l’un des piliers centraux de l’économie costaricienne. Elle représentent à elle seule pas moins de 10% du PIB national. Or, depuis le début de la crise du Covid-19, le secteur touristique est au point mort. Cela pourrait s’avérer une vrai menace pour l’économie du pays si cela devait se prolonger trop longtemps. Le pays se serre donc les coudes afin de traiter aussi efficacement que possible la pandémie. Il délivre au passage un message rassurant aux potentiels voyageurs : « Quand vous serez de nouveau à même de voyager, nous serons prêts à vous accueillir en toute sécurité ».
*Sources :
https://www.americaeconomia.com/politica-sociedad/sociedad/costa-rica-la-excepcion-de-america-durante-la-epidemia-del-coronavirus
https://www.ucr.ac.cr/coronavirus.html
https://covidam.institutdesameriques.fr/le-costa-rica-bon-eleve-de-la-pandemie/
https://coronavirus.jhu.edu/data/mortality
https://www.crhoy.com/nacionales/cientificos-ticos-anuncian-que-estan-listos-para-producir-medicamento-contra-covid-19/
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